Pages Senties - Aujourd'hui : Georges Hyvernaud, Le Wagon à Vaches. I
03/01/2014 10:17-"Iseult, chaque samedi, part pour un quelconque camping. Je la rencontre dans l'escalier, accablée d'un baluchon grotesque. Dix kilos de godasses aux pieds. D'une culotte de boy-scout sortent de maigres jambes brûlées. C'est ça, Iseult. Trente heures de camping et le reste de la semaine dans sa quincaillerie. Et ainsi de semaine en semaine. Un petit destin bien bouclé. Un destin d'insecte, dans le genre du mien et de pas mal d'autres. Et encore, destin, c'est un mot plutôt excessif pour désigner ce consentement morne à l'existence."
-"Mme Bourladou apprécie ma conversation. Avec moi, on peut aborder les grands sujets. La Littérature. L'Art. Mme Bourdalou connaît le nom de plusieurs peintres modernes. Elle lit Le Figaro Littéraire et des romans où il est dit de l'héroïne que sa poitrine palpite sous son corsage léger."
-"Même une Mme Bourladou...Rien de plus vide. Quarante années de bonnes manières et de sourire émaillés. Quarante ans de dentelle au crochet, de fidélité conjugale et de recettes de cuisine. Signe distinctif : la passion des produits d'entretien. Au sens large du mot - tout ce qui permet d'entretenir les cuivres, la conversation, la peau humaine, l'intelligence bourgeoise et les meubles Louis XVI. Et pourtant."
-"Mais moi, je ne parviens à voir qu'une dame qui prend de l'âge, qui s'empâte, qui vient d'acheter un appareil américain pour combattre le double menton."